En matière d’assurance construction, la concurrence est libre en Europe. Résultat : des compagnies low cost cassent les prix. Une des plus importantes, basée à Gibraltar, vient de faire faillite, laissant 60 000 Français sur le carreau.
En matière d’assurance construction, la concurrence est libre en Europe. Résultat : des compagnies low cost cassent les prix. Une des plus importantes, basée à Gibraltar, vient de faire faillite, laissant 60 000 Français sur le carreau.
Dommages ouvrage, responsabilité civile décennale, responsabilité civile professionnelle, constructeur non réalisateur, tout risque chantier, constructeur de maison Individuelle, garanties financières d’achèvement… Tous les contrats d’assurance construction d’Elite Insurance Compagny LDT, société gibraltarienne qui exerçait ses activités dans 13 pays européens, sont résiliés au 15 septembre 2020.
Quelque 60 000 Français assurés auprès cette compagnie, principalement sur des polices d’assurance construction qui ont une période d’exposition de dix ans, sont concernés et invités à entamer leurs démarches rapidement. L’ACPR indique aux assurés qu’ils doivent se tourner vers Armour Risk et ACS Solutions, pour toutes les questions sur la procédure en cours et les démarches à effectuer.
Cette faillite, une de plus, vient rappeler a tous le problème récurrent des assurance construction. Un sujet est désormais géré au plus haut niveau de l’État. Julien Denormandie avait évoqué le sujet publiquement, lors d’un colloque organisé par la Fédération française du bâtiment (FFB).
« Le secteur des assurances est un acteur à part entière de l’acte de construire, et si l’assureur s’effondre, c’est tout le château qui s’effondre », avait assuré l’actuel ministre du Logement. Bercy, par la voix du cabinet de Bruno Le Maire, de son côté, assure désormais suivre de près la crise et avoir commencé à activer plusieurs leviers pour protéger les assurés français. L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) a été saisie pour opérer des contrôles, ainsi que la justice.
Comment en est-on arrivée là ?
Pour bien comprendre les tenants de cette crise, il fait remonter à la source de la LPS, la libre prestation de service. Et à l’origine, il s’agit d’une réglementation européenne. Plus précisément l’article 56 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) qui dispose que les personnes physiques ou morales (commerçants, artisans, sociétés, etc.) légalement établies dans un État membre ont le droit d’offrir des services, notamment d’assurance, dans un autre État membre. Depuis plusieurs années, des courtiers en assurance gagnent des appels d’offres de construction en poussant des solutions « low cost » d’assureurs européens. Rapidement, ces offres « moins disantes » se sont arrogé près de 10 % du marché. Des milliers de particuliers mais aussi de nombreux promoteurs ont donc souscrit des assurances dommages ouvrages ou des assurances constructions, dites de garanties décennales, auprès d’assureurs basés au Danemark, à Gibraltar ou au Liechtenstein, sans avoir au préalable tester leur solidité.
Problème : certains de ses assureurs européens ont utilisé la LPS pour contourner la réglementation hexagonale et réaliser moins de provisions financières que celles exigées par la loi aux assureurs français. Résultats : après plusieurs faillites d’assureurs basés à l’étranger, intervenant en France sous le régime de la libre prestation de services, des dizaines de milliers d’entreprises et de maîtres d’ouvrage se retrouvent fragilisés dans l’hexagone. Car si depuis le 1er juillet 2018, le fonds de garantie des assurances obligatoires (FGAO) se substitue aux contrats d’assurance dommage ouvrage souscrits par les particuliers, il faut rappeler que le fonds n’intervient pas pour les clients professionnels.
Comment réagir pour son assurance construction ?
« Nous conseillons aux professionnels d’être très vigilants sur le marché de l’assurance construction : les bas prix proposés peuvent être trompeurs », explique-t-on à Bercy. « Il ne faut pas se tourner vers des sociétés, assureurs ou courtiers, qui pratiquent le dumping par les prix. » Comme le conseille le Ministère des Finances, la prudence impose de se tourner vers des prestataires connus et reconnus. C’est trop tard pour les clients d’Elite insurance.