Le risque le plus immédiat pour les marchés financiers reste le risque géopolitique avec ses implications macroéconomiques fortes liées notamment aux prix et à la disponibilité des matières premières.
Le risque le plus immédiat pour les marchés financiers reste le risque géopolitique au deuxième trimestre, avec des implications macroéconomiques fortes liées notamment aux prix et à la disponibilité des matières premières, mais aussi liée à l’impact sur le moral des consommateurs et des entreprises. Comme nous l’explique Alexandre Baradez, responsable de l’analyse marchés chez IG France.
Ce risque géopolitique, qui a alimenté ces dernières semaines une inflation déjà élevée, a lui-même des implications en termes de trajectoire des taux, avec des répercussions aussi bien sur les valeurs cycliques que les valeurs de croissance.
Le cours de matières premières a grimpé de 25% en moyenne depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine si on prend comme référence l’indice CRB des matières premières, qui inclut l’énergie, les métaux et les produits agricoles. Le conflit géopolitique n’est évidemment pas le seul responsable de la hausse du prix des matières premières depuis 2 ans mais il a catalysé la tendance. Le prix moyen des matières premières a été multiplié par 3 depuis le creux lié à la première vague de Covid au premier semestre 2020.
En regardant les derniers chiffres d’inflation aux Etats-Unis et notamment la progression d’un mois à l’autre des prix incluant l’énergie et l’alimentation, on remarque que l’énergie a contribué à hauteur de deux tiers à cette progression, ce qui traduit l’importance du choc géopolitique sur l’évolution des prix.
Même si la Fed ne va pas surréagir à une donnée mensuelle, cette situation accroit tout de même la pression sur Jerome Powell et le FOMC, qui faisaient déjà face à une progression des prix dynamique avant la guerre en Ukraine, tirée par la forte demande et des problèmes logistiques persistants au niveau mondial, entretenant les tensions sur les approvisionnements et donc les prix. Les confinements récents en Chine continuent d’alimenter cette pression.
Les anticipations d’inflation moyen-terme (swap d’inflation 5Y5Y) continuent de se tendre en Europe et aux Etats-Unis, respectivement à 2.40% et 2.85%, c’est-à-dire largement au-dessus de l’objectif de la Fed et de la BCE qui reste fixé à 2%. Si les anticipations d’inflation continuent de se tendre, c’est que les marchés ne croient pas en la capacité des banques centrales, pour l’instant, de ramener l’inflation vers l’objectif de 2%. Elles ont donc un peu de marge pour relever les taux mais vont devoir piloter à vue, car la crise géopolitique impacte l’économie mondiale et la confiance.
Le retournement de nombreux indicateurs de sentiment, comme le ZEW ou l’IFO en Allemagne, ou encore la contraction des indices d’activité (PMI) en Chine dans le secteur manufacturier mais aussi celui des services, font désormais planer la menace d’une destruction de la demande. Et si les banques centrales sont trop agressives à ce moment-là, elles risquent d’accentuer l’impact sur la confiance des ménages et de faire plonger les économies en récession.
Elles doivent donc infléchir la tendance sur les prix qui existait avant la guerre en Ukraine et avant les derniers confinements en Chine, en considérant ces derniers évènements comme « temporaires » afin de ne pas surréagir.
Si un cessez-le-feu intervient en Ukraine dans les semaines qui viennent, un reflux assez prononcé devrait intervenir sur les matières premières, influençant de fait la trajectoire des taux en Europe et aux Etats-Unis, mais également les anticipations de marché sur l’inflation. Ce qui pourrait adoucir un peu la rhétorique de la Fed ou, tout du moins, commencer à faire plafonner l’agressivité ambiante des banques centrales, permettant ainsi aux taux et aux marchés actions de se stabiliser.
Si un cessez-le-feu intervenait au deuxième trimestre, ses effets sur les marchés se cumuleraient aussi aux déconfinements qui interviendraient en Chine, les vagues de Covid n’étant pas éternelles, ce qui permettrait là aussi de détendre les taux en raison d’une meilleure visibilité sur les flux logistiques et donc sur les prix.
Les catalyseurs pour une détente des marchés sont assez identifiables, reste à confirmer le « timing » notamment pour la question géopolitique…