Les experts de la fiscalité immobilière font le lien entre la mensualisation du taux d’usure et l’augmentation à venir des taux d’intérêts.
Les analystes de Qlower, spécialiste de la fiscalité des investisseurs immobiliers, font le lien entre la mensualisation du taux d’usure et l’augmentation à venir des taux d’intérêts.
L’impact après impôts reste mineur pour les investisseurs immobiliers qui bénéficient d’un contexte unique de taux fixes, tout en restant renégociables à la baisse.
Le taux d’usure, une protection qui a finalement bloqué l’accès au crédit
L’accès au crédit s’est fortement resserré en 2022, allant jusqu’à la quasi-impossibilité d’emprunter pour une large partie de la population. La conséquence a été immédiate: la demande en immobilier s’est réduite, entraînant une amorce de baisse des prix des biens à vendre. La cause de ce resserrement : l’effet ciseau observé entre l’augmentation rapide des taux d’intérêts et le plafond imposé par le taux d’usure.
Le taux d’usure est le taux maximum auquel les banques peuvent prêter, tous frais inclus. Il est dicté par la Banque de France chaque trimestre, dans l’optique de maîtriser la hausse des taux d’intérêts bancaires. Mais le récent contexte d’inflation a fait rapidement grimper les taux qui ont atteint le taux d’usure, bloquant ainsi tout octroi de crédit à une large population d’investisseurs. La Banque de France a réagi en janvier 2023 en annonçant la mensualisation du taux d’usure, pour quelques mois seulement.
Un taux d’usure réévalué mensuellement, est-ce vraiment une bonne nouvelle ?
Le taux d’usure sert à protéger les emprunteurs d’une hausse trop rapide des taux d’intérêts. Il a en réalité bloqué l’octroi de crédit à une large population d’emprunteurs. Dans le contexte actuel d’inflation proche de 6%, emprunter même à 4% reste une bonne nouvelle dès lors qu’on peut emprunter.
En mensualisant le taux d’usure, la Banque de France permet aux banques de continuer à prêter, dans des conditions de marché qui évoluent rapidement. L’objectif recherché est d’éviter le blocage observé en 2022 et de fluidifier le marché.
Emprunter à 3 ou 4% reste une bonne nouvelle pour les investisseurs immobiliers. Le spectre du blocage de l’accès au crédit, donc du marché immobilier, s’éloigne.
Les projets nécessitant un financement bancaire peuvent à nouveau prendre corps même si le crédit est plus cher. Les investisseurs immobiliers peuvent poursuivre la constitution de leur portefeuille immobilier et être rassurés quant à la liquidité de leurs biens à de potentiels acquéreurs.
Un financement plus cher doit-il freiner un projet d’investissement locatif ?
Emprunter à 3 ou 4% est évidemment moins intéressant qu’emprunter à 1%. Mais cette période d’accès au crédit immédiat et gratuit est sans doute écartée pour longtemps. En janvier 2023, la France reste le pays où le coût du crédit est le moins cher au monde. Si ça n’était pas suffisant, la France est un des rares pays européens où on emprunte à taux fixe, renégociable uniquement à la baisse. Ainsi, si les taux descendent à 2%, l’investisseur aura tout loisir de renégocier son taux comme il l’a déjà fait depuis 10 ans environ. Mais investir à un taux élevé pour un investissement locatif est moins problématique que pour une résidence principale. Depuis 2011, les intérêts d’emprunt ne donnent plus droit à un avantage fiscal, alors qu’au réel, le coût du crédit est déductible des revenus fonciers (location vide) et des revenus BIC (location meublée), en détention directe comme en SCI.
L’augmentation du taux d’intérêt se traduit pour l’investisseur par un effort de trésorerie plus important
L’augmentation de 1 point du taux d’intérêt coûte 50€ par mois par tranche de 100 000€ emprunté. En clair, emprunter 100 000€ à 3% au lieu de 1% ajoute 100€ à la mensualité qu’il faut débourser chaque mois. En location vide comme en location meublée. Après impôt, les choses changent selon le mode de location et la fiscalité qui en découle.
• En location nue (régime Foncier réel), les intérêts sont déductibles. Cet effort de 100€ par mois est donc entièrement déduit des revenus taxables et réduit l’impôt.
• En location meublée (régime BIC réel), les intérêts sont aussi déductibles mais les amortissements génèrent le plus souvent du déficit.
On accentue donc le déficit sans réellement « profiter » de ces charges les premières années suivant l’investissement.
A termes, 20 ans après l’acquisition, dans des conditions d’inflation et d’IRL actuels, hors vacance locative, l’effort d’épargne permettant de rembourser un crédit immobilier de 100 000€ à 3% d’intérêt est de :
– 56 700€ en location nue
– 18 000€ en location meublée
La mensualisation du taux d’usure participe à l’accélération de l’augmentation des taux d’intérêts. Sa vertu est de réduire le risque de blocage du crédit bancaire, carburant nécessaire à tout achat immobilier.
Contrairement aux acquéreurs de résidences principales, les investisseurs immobiliers ne subiront qu’un impact en trésorerie puisque les coûts liés au crédit sont déductibles des revenus locatifs. Le coût du crédit, même à 3 ou 4%, reste inférieur à l’inflation mesurée ces derniers trimestres et doit être vu comme une opportunité, surtout en comparaison des pays voisins qui empruntent à taux variable et avec plus de difficultés de renégociation de taux en cas de baisse.